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Cancer et nutrition: où en est-on?

En Belgique et partout ailleurs, le nombre de nouveaux cas de cancer augmente chaque année. Il semble que certains facteurs de risques soient liés à l’alimentation et qu’une nourriture saine et équilibrée possède des effets protecteurs contre le cancer. Plusieurs experts ont fait le point sur la question lors du dernier symposium organisé par l’Institut Danone le 17 octobre dernier à Bruxelles.


Health and Food

99 Souvenir 2009

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De nombreuses études ont déjà été réalisées en ce qui concerne l’apparition, le développement et le traitement du cancer la nutrition semble occuper une place importante dans sa prévention. Les habitudes alimentaires pourraient en effet favoriser l’apparition de certaines formes de cancer ou, au contraire, contribuer à leur prévention

L’Etude EPIC pour clarifier la situation
Voilà maintenant plusieurs décennies que la recherche s’intéresse au lien entre nutrition et cancer. Malheureusement, peu de facteurs nutritionnels jouant un rôle causal dans le cancer ont été mis en évidence. Parmi les raisons invoquées, citons la difficulté d’évaluer avec précision les habitudes alimentaires de chacun, les biais pouvant survenir en fonction du type d’étude réalisée ou encore le fait que les marqueurs biologiques de l’alimentation ou du métabolisme puissent être altérés par la présence de tumeurs.

Pour tenter de surmonter ces limitations, l’étude EPIC (European Prospective Investigation into Cancer and Nutrition) a été initiée en 1992. Cette étude de grande ampleur a porté sur plus de 500 000 volontaires dans 10 pays. Les participants étaient âgés entre 35 et 70 ans. Les chercheurs ont recueilli chez ces volontaires des données concernant leurs habitudes alimentaires, leurs paramètres anthropométriques au début de l’étude et des échantillons sanguins ont été prélevés chez la plupart d’entre eux.


Des hypothèses infirmées et confirmées
De nombreuses études ont démontré l’existence d’un lien entre la consommation de fruits et/ou de légumes et la réduction du risque de certains cancers tels que le cancer de l’estomac, de l’œsophage, des poumons, de la vessie ou encore du colorectum. Ce lien a également été établi grâce à l’étude EPIC mais il s’avère qu’il soit nettement moins important.

En revanche une association entre la consommation de fibres, présentes dans les fruits, légumes et céréales et la réduction du risque de cancer colorectal a été clairement établie. Il semble donc que les fibres fournies par les céréales pourraient constituer un facteur clef dans la protection contre le cancer. Le rôle protecteur de la consommation de fruits sur le développement du cancer des poumons a également été confirmé lors de l’étude EPIC, contrairement à celui lié à l’ingestion de légumes. Aucun lien n’a pu être établi entre la consommation de fruits ou légumes et la réduction du risque de cancer du sein et de la prostate. Certains fruits et légumes particuliers ont été identifiés comme ayant des effets préventifs dans le développement de plusieurs types de cancers. C’est le cas de l’oignon et de l’ail pour le cancer de l’estomac et du citron pour le cancer du cardia par exemple.

Les facteurs nutritionnels les plus fortement liés à l’augmentation du risque de cancer ayant été mis en évidence par l’étude EPIC sont les viandes rouges et la charcuterie. Ces produits sont en effet associés à une plus grande incidence de cancer colorectal et gastrique.

Du côté des facteurs métaboliques, l’étude a révélé que l’obésité et plus particulièrement l’obésité viscérale était significativement liée à un risque accru de développement de cancer du colorectum, de l’endomètre, du rein, du pancréas et du sein (post-ménopause)


Vitamine D et cancer : fausses pistes
Un groupe de travail créé par le Centre International de Recherche Sur Le Cancer (CIRC) a également réalisé une revue de la littérature en 2008 afin de mettre en évidence une relation de cause à effet entre le taux de vitamine D et le cancer.

Il avait été prouvé, il y a quelques années, qu’aux Etats-Unis et en Europe, le taux de mortalité de plusieurs cancers augmentait avec la latitude. Plusieurs études ayant émis l’hypothèse selon laquelle la latitude était un indicateur de l’exposition solaire, les scientifiques ont alors pensé que le principe sous-jacent au lien entre lumière du soleil et cancer était le taux de vitamine D puisque les rayons ultraviolets de type B sont impliqués dans sa synthèse au niveau cutané. Plusieurs essais, qualifiés « d’écologiques », ont alors été réalisé mais leurs résultats doivent être considérés avec circonspections car elles sont malheureusement sujettes à de nombreuses erreurs méthodologiques.

La revue systématique des études d’observation portant sur la relation entre le taux sérique de 25-hydroxyvitamine D (meilleur biomarqueur du taux de vitamine D) et les cancers colorectal, du sein, de la prostate ou encore l’adénome colique n’a pas permis d’affirmer l’existence ou non d’un lien de cause à effet.

Les résultats de cette revue de la littérature mettent en évidence le fait que les preuves expérimentales actuelles ne soutiennent pas la thèse d’un rôle important de la vitamine D dans la prévention du cancer. De nouvelles études portant sur l’impact d’une supplémentation quotidienne plus importante (1000-1500 U.I.) sur la mortalité devraient être envisagées afin d’établir si oui ou non il existe un lien entre vitamine D et cancer.


La nutrition dans le traitement du cancer
Au vu des nombreuses preuves précitées, il est clair que la nutrition joue un rôle important dans la prévention du cancer. Mais elle a également un rôle à jouer dans le traitement de cette pathologie. Si l’alimentation ne permet pas de traiter le cancer, elle peut néanmoins y jouer un rôle adjuvant.

Il n’existe pas de panacée pour les conseils nutritionnels en cas de cancer. Ces derniers doivent toujours être donnés de façon individualisée en tenant compte des possibilités psychologiques du patient. L’accent doit avant toute chose être mis sur l’amélioration de sa qualité de vie.

Le fait de connaître le diagnostic, les symptômes, la médication, et également les données anthropométriques du patient permettent, avant même un premier contact, de repérer les problèmes alimentaires éventuels et il est dès lors plus facile d’aborder les questions nutritionnels avec le patient dans le but de déterminer son état nutritionnel, de connaître ses plaintes, ses aversions, pour pouvoir finalement lui donner les conseils les plus adaptés à sa situation.

Alexandre Dereinne, diététicien

Références

Institut Danone. Cancer et nutrition. Symposium Institut Danone donné le 17 octobre 2009 à l’Auditorium 2000. Bruxelles.
 

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