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Probiotiques en Europe: une cinsommatrion aveugle

Un sondage européen montre le fossé à traverser pour asseoir les probiotiques auprès du grand public. Si l'image est globalement positive, la perception de leurs effets par le consommateur est en effet loin d'être claire et varie considérablement d'un pays à l'autre.



Par Nicolas Rousseau

" HEALTH & FOOD " numéro 80, Décembre
2006

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Une réunion d'experts organisée par l'YLFA (Yoghurt and Live Fermented Milk International) s'est tenue en juin 2006 à Vilnius, en Lituanie. Ce club, récemment créé, a pour but de promouvoir les bienfaits nutritionnels du yaourt et des laitages fermentés, à la lecture des données scientifiques les plus récentes. À cette occasion, la TNS-Sofres, un institut d'études de marché et d'opinion international, a révélé les résultats d'une enquête sur les probiotiques menée entre avril et mai 2006. L'échantillon incluait 3000 consommateurs de plus de 15 ans provenant de Pologne, d'Allemagne, d'Espagne, de Danemark et de France.

Un concept vague...

Premier enseignement de cette étude : à l'exception de l'Allemagne (78 % des répondants), le terme probiotique n'est connu que chez un consommateur sur deux en France et en Espagne et un consommateur sur trois en Pologne et au Danemark. Les hommes, les personnes ayant des revenus élevés et les moins de 18 ans sont les plus avares de commentaires. Sauf pour le Danemark (28 % des répondants), l'impression est cependant globalement très positive pour environ 70 % du public interrogé. Positif ne veut cependant pas dire explicitement compris. En France, le terme probiotique évoque spontanément l'alimentation biologique, la naturalité et la santé. Idem en Allemagne où certains consommateurs évoquent à demi-voix un rôle des probiotiques dans la digestion. Espagnols et Polonais s'accordent par contre sur la santé de l'intestin, le renforcement des défenses naturelles, les bonnes bactéries et la santé en général. Au Danemark, les probiotiques sont indéfinissables par le consommateur, ce qui est relativement étonnant pour un pays traditionnellement grand consommateur de laitages... Enfin, seuls 4 consommateurs sur 10 (6 en Pologne) identifient le yaourt comme un probiotique !

Pour un consommateur sur deux

Mais le plus curieux provient certainement des habitudes de consommation. Pratiquement tous les consommateurs savent citer spontanément une marque de probiotique, ce qui situe bien la puissance du marketing. Au Danemark, 70 % des personnes interrogées en ont déjà consommé ces derniers mois où en consomment régulièrement ! Ailleurs, près d'un consommateur sur deux est un mangeur plus ou moins régulier.... La majorité ignore donc ce qu'elle ingère et fait confiance à la publicité ! Au niveau du profil, il s'agit principalement de cadres, hommes et femmes, ayant un ou plusieurs enfants. Les célibataires et les... Allemands sont plutôt des petits mangeurs. Même lorsque l'interview est orientée, les perceptions restent divergentes entre Européens. Si plus de 70 % en moyenne reconnaissent la présence de bonnes bactéries dans les probiotiques, les avis sont plus partagés, surtout au Danemark, en France et en Allemagne sur un effet positif sur la santé. Globalement, Espagnols et Polonais sont les plus favorables envers les probiotiques. Un consommateur sur deux au Danemark, en France et en Allemagne est septique en revanche sur le renforcement des défenses naturelles par les probiotiques. Enfin, entre 30 et 40 % des consommateurs, toutes nationalités confondues, estiment encore qu'il existe un risque à moyen ou long terme lié à leur consommation... Les bactéries font toujours peur !

Le prix et la publicité dérangent

En comparaison de leurs effets bénéfiques, hormis au Danemark, une large majorité de consommateurs (environ 70 %) estiment le prix des probiotiques trop élevé. Et s'ils sont influencés par la publicité dans leur consommation, la plupart des personnes interrogées émettent de sérieux doutes sur les bénéfices santé vantés par les producteurs de probiotiques. La confiance n'est donc pas totalement aveugle et illustre bien le fait que les consommateurs européens n'ont encore qu'une faible compréhension des probiotiques. Logique dans la mesure où les principaux canaux d'informations sur le sujet demeurent d'abord les médias, suivis par la famille ou les amis, les producteurs et, loin derrière, les professionnels de santé. Les médias et le bouche à oreille ont, par ailleurs, un rôle ambivalent dans la promotion des probiotiques. Une personne sondée sur deux en Allemagne, en Espagne ou en Pologne juge en effet l'information qu'il reçoit ambiguë ou dissuasive... La nouvelle réglementation européenne sur les allégations nutritionnelles et de santé pourra-t-elle lever l'épais brouillard qui entoure les probiotiques ? Une chose est sûre, en dépit de signes cliniques tangibles de protection, ces microbes de santé ont encore un long chemin à parcourir pour convaincre définitivement le consommateur. Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement. Ce qu'on mange avec goût se digère aisément, disait un célèbre philosophe...

 

 

Nicolas Rousseau , Diététicien
Références:
YLFA International workshop, Vilnius, Lituania. June, 1st, 2006

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