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Probiotiques : à creuser chez l’enfant

Les probiotiques brouillent encore les pistes en pédiatrie. Les effets bénéfiques observés chez l’adulte sont, en effet, difficiles à démontrer chez l’enfant. Mais les quelques rares travaux déjà publiés autorisent le même enthousiasme, même s’il ne faut pas encore s’enflammer.

Par Nicolas Rousseau

" HEALTH & FOOD " numéro 64, Mars/Avril 2004

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Les premières définitions des probiotiques insistaient sur les effets positifs pour la santé façonnés par l'amélioration de la composition et du métabolisme de la flore intestinale de l'hôte. Plus tard, d'autres découvertes ont conduit à revoir cette position. A l'évidence, tous les effets bénéfiques observés sur la santé ne sont pas entièrement attribuables à la modulation de l'équilibre de la flore intestinale.

A l'heure actuelle, les scientifiques du « yaourt » se déchirent sur la question de la survie des probiotiques dans l'organisme. Est-elle absolument nécessaire ? Rien n'est moins clair. Des études récentes ont suggéré que des micro-organismes morts pouvaient aussi exercer des effets favorables sur la santé. Le débat est animé et certaines « écoles » proposent déjà de nouvelles définitions, incluant cette fois des « composants de cellules microbiennes », en lieu et place du terme « micro-organisme vivant ». Et la situation se complique un peu plus au vu de la liste non exhaustive de candidats potentiels au titre de probiotique.

Une forêt vierge

De nombreux produits laitiers fermentés émargent, naturellement, à cette catégorie. Yaourt, fromage, babeurre en sont les plus célèbres, pourtant, leur efficacité est encore très limitée. Malgré tout, les probiotiques surfent sur la vague populaire de la « santé » et leur commerce est devenu aujourd'hui très florissant. La prudence demeure toutefois pour plusieurs catégories de produits, dont la qualité est fort discutable. D'après certaines études, seulement 8 % des produits laitiers contiendraient réellement ce qui est annoncé sur l'emballage…

Bactérie de souche

La spécificité de la souche est certainement une des caractéristiques les plus étudiées parmi les probiotiques. Ainsi, il a été démontré in vivo et in vitro que certaines souches jouent la compétition et ont des activités antimicrobiennes et antagonistes directes pour exclure ou inhiber la croissance de microbes pathogènes. C'est le cas notamment de plusieurs bactéries lactiques. Aucune conclusion hâtive ne peut cependant être tirée à ce stade chez l'homme.

Cet effet antimicrobien se construit par l'installation au sein de la flore indigène d'une flore plus résistante à la colonisation. Certaines souches de lactobacilles peuvent également se fixer sur les sites de liaison de toxines bactériennes, inhibant alors leur sécrétion.

Une large adhésion ?

Autre sujet de discussion : l'adhésion des probiotiques dans l'intestin. Sur 25 souches de lactobacilles étudiées, 7 ont la capacité d'adhérer aux cellules caco-2 de l'entérocyte humain. On ne sait toujours pas à ce jour si cet effet est dose-dépendant. Des études menées avec une souche d'E.coli ont montré que la dose diminuait la viabilité de la souche. En clair, augmenter la dose n'augmenterait le nombre de contact avec les cellules caco-2, mais ce phénomène reste obscur.

La combinaison des souches donnent, par contre, des résultats intéressants : l'adhérence du Bifidobactérium Bb12 augmente ainsi de 31 à 39 % sur cellules saines et de 26 à 44 % sur cellules infectées par le rotavirus, en présence de Lactobacillus rhamnosus. Un effet synergique qui stimule l'adhésion et donc le système immunitaire, entre autres via une plus forte sécrétion d'IgA, qui en sus, améliore la résistance mucosale aux infections gastro-intestinales.

Spermine et spermidine

Le cas particulier du Saccharomyces boulardii est aussi éloquent. Outre son effet décrit sur l'inhibition des toxines bactériennes, la levure est l'un des rares probiotiques à produire des polyamines, en l'occurrence la spermine, la spermidine et leur précurseur diamine, la putrescine.

Ces petits peptides sont impliqués dans la croissance et la différenciation cellulaire et ont, en tout cas chez l'animal, des effets trophiques directs et indirects au cours de la maturation de l'intestin.

Chaque souche probiotique a donc son histoire et les données obtenues avec une ne sont pas forcément extrapolables à une autre. Or, cette notion de spécificité bactérienne a encore été trop peu validée cliniquement aujourd'hui.

En prévention

S'il demeure encore autant d'inconnues à propos des effets des probiotiques chez l'adulte, que dire de ce qu'il existe chez l'enfant… Bien qu'il faille encore faire toute la lumière sur le sujet, l'administration quotidienne de lactobacilles pourraient réduire le nombre de jours d'absentéisme dans les crèches, par une diminution des maladies infectieuses. Autant de questions surgissent encore lorsque l'on aborde la diminution des maladies autoimmunes. De plus, les effets à long terme sont difficiles à prouver puisque même les effets protecteurs de l'allaitement maternel prolongé sur l'atopie plus tard dans la vie prêtent toujours à caution. Enfin, l'adjonction récente d'oligosaccharides prébiotiques et de probiotiques aux formules pour nourrisson rend l'interprétation de ce type d'intervention encore plus aléatoire. La seule chose que l'on puisse affirmer aujourd'hui, quel que soit l'âge, c'est que les probiotiques régulent le transit intestinal et améliorent la consistance des selles.

Nicolas Rousseau,
d'après un texte du Prof. Yvan Vandenplas
( Vrije Universiteit Brussel)

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