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Les probiotiques : le retour des "grands colonisateurs" ?

L’histoire est bien connue. Au début du siècle passé, la longévité exceptionnelle des paysans bulgares fut attribuée à un lait fermenté, le yaourt. Quelques années plus tard, les essais cliniques sur les effets de cette première génération de probiotiques avaient pour thème la constipation.

Par Nicolas Rousseau

" HEALTH & FOOD " numéro 47,
Juin 2001

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Aujourd’hui, le yaourt bulgare a fait des émules et les candidats probiotiques se bousculent au portillon du côlon. La grande famille des bactéries lactiques mais aussi certaines levures, sont entrés dans la danse, multipliant à l’infini le potentiel thérapeutique des aliments, suppléments et médicaments probiotiques. En effet, un probiotique n’est pas l’autre et force est de constater qu’avec l’avancement de l’état des connaissances, la diversité rime aussi bien avec les souches bactériennes que leurs effets fonctionnels dans l’organisme.

Le probiotique idéal pour une vie meilleure

Le probiotique est défini comme un supplément alimentaire composé de bactéries vivantes qui exercent un effet bénéfique pour l’hôte en améliorant l’équilibre de la flore intestinale. Cet effet suppose, pour le probiotique idéal, qu’il survive au passage du tractus gastro-intestinal, s’établisse en permanence dans l’intestin grêle et le côlon et produise un bénéfice spécifique pour la santé en induisant une réponse immunitaire, en produisant des nutriments qui nourrissent l’organe ou encore en le protégeant contre les agents pathogènes, notamment en synthétisant des substances antimicrobiennes (acide lactique, bactériocines). En théorie… En effet, à l’heure actuelle, aucun probiotique ne correspond à ce profil idyllique, même les plus performants. En moyenne, seulement 20 à 40 % des germes(2), quels qu’ils soient, survivent à l’échafaud digestif et arrivent intacts dans le côlon. Cette faible proportion s’avère toutefois suffisante pour en retirer des avantages, à condition que le probiotique soit consommé quotidiennement. Même les souches d’origine humaine comme le Lactobacillus GG ne font que transiter dans le côlon sans réellement y adhérer et disparaissent rapidement une fois que l’apport alimentaire est interrompu.

Vogue la diarrhée et l’ulcère

Depuis 1930, on sait que les bactéries lactiques améliorent la motilité intestinale et soulagent la constipation. La sévérité et la durée de certaines maladies de l’estomac ou de l’intestin peuvent également être réduites par l’ingestion journalière d’une quantité suffisante de probiotiques. Ainsi, des lactobacilles inhibent la colonisation de l’estomac par l’Helicobacter pylori, un germe qui est associé à la gastrite, à l’ulcère peptique et au cancer de l’estomac. D’autres études portant sur certaines souches de lactobacilles ou des levures (Saccharomyces boulardii), montrent qu’ils améliorent les symptômes de maladies inflammatoires de l’intestin comme la recto-colite ulcérohémorragique ou la maladie de Crohn. La durée d’une diarrhée peut être sensiblement raccourcie par un traitement aux probiotiques. Ceux-ci se révèlent efficaces notamment dans la diarrhée de l’adulte induite par les antibiotiques, la turista ou encore la diarrhée de l’enfant causée par les rotavirus. Ces effets sont actuellement les mieux documentés pour la souche Lactobacillus GG et pour la levure Saccharomyces boulardii.
L’intolérance au lactose, qui affecte jusqu’à 75% de la population mondiale, trouve refuge dans la consommation du yaourt, un vieux probiotique dont l’efficacité dans ce domaine est bien établie.

Mais encore…

Certaines bactéries lactiques peuvent stimuler et réguler le système immunitaire intestinal, particulièrement en contrôlant l’équilibre entre les cytokines pro- et anti-inflammatoires. Cet effet conjugué à une sécrétion spécifique d’immunoglobulines telles que l’IgA, diminue la perméabilité intestinale et protège l’organe aussi bien dans les processus infectieux que dans les réactions d’hypersensibilité, comme l’allergie. Une expérience récente a étayé ce propos en montrant que des enfants allergiques avaient une flore intestinale où prédominaient peu de bactéries lactiques, mais plutôt des coliformes et le Staphylococcus aureus.
Chez l’animal, plusieurs bactéries lactiques peuvent hydrolyser les sels biliaires et, par la même occasion, augmenter leur excrétion ainsi que celle du cholestérol et des triglycérides dans les fèces. Peu d’études cliniques sur ce sujet ont été menées chez l’homme et actuellement, elles ne permettent pas de conclure en faveur d’un effet important des probiotiques sur la cholestérolémie.
Des expériences préliminaires suggèrent que certains probiotiques peuvent réduire la tension artérielle chez des sujets hypertendus mais, ici encore, les preuves sont loin d’être irréfutables.
Enfin, chez l’homme et l’animal, des études ont mis en évidence que quelques probiotiques semblent avoir un effet favorable sur l’activité de certaines enzymes bactériennes impliquées dans l’activation de pro-cancérogènes au niveau colique.

L’infiniment petit n’a pas encore fini de nous étonner !

Nicolas Rousseau
Diététicien Nutritionniste

Références :
(1) Lori Kopp-Hoolihan. Prophylactic and therapeutic uses of probiotic: a review. J Am Diet Assoc 2001; 101:229-238.
(2) Anatoly Bezkorovainy. Probiotics : determinants of survival and growth in the gut. Am J Clin Nutr 2001; 73(suppl): 399s-405s

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